En prononçant la dissolution du Front national pour la défense de la constitution (FNDC), le gouvernement de la transition guinéenne est certainement conscient qu’il lance un mauvais signal de plus à l’endroit de l’opinion nationale et internationale. Dans le même temps, la junte militaire, fait montre d’une fébrilité poussée, qui frise avec peur et panique. Les raisons avancées par les putschistes sont des plus fallacieuses et des plus grossières. En réalité, comme le dit l’adage bien connu, «qui veut noyer son chien l’accuse de rage». Le scénario monté depuis le palais de Sékhoutouréya n’a rien de nouveau. Il a même déjà été expérimenté sous d’autres formes par le l’ancien président Alpha Condé, qui n’a laissé aucun répit aux leaders et militants du FNDC qui ont sorti la mobilisation des grands jours pour sauver la loi fondamentale du pays. La constitution était, en effet, en danger et la Guinée avec. Elle était sur le point de passer sous le hachoir de celui qui d’éternel opposant voulait passer à éternel président. Certes, envers et contre tout, Alpha Condé a arraché son 3e mandat, dans le but de s’ouvrir un boulevard sur la présidence à vie. Mais acculé et affaibli par les manifestations du FNDC et de l’opposition qui ont été réprimées dans le sang, l’homme sera cueilli comme un fruit mûr par le colonel Mamady Doumbouya. Le putschiste qui a sans doute tiré leçon des malheurs de sa victime, a donc pris les devants, pour mettre hors-jeu le FNDC qui l’empêche de mener une transition taillée sur mesure et surtout de replonger la Guinée dans les affres des pouvoirs de fer qui se sont succédé. Cette peur de la «marée rouge», couleur arborée par les militants du Front lors des manifestations de protestation, justifie bien cette mesure radicale prise par la junte militaire guinéenne qui n’y va pas de main morte pour diaboliser le FNDC. Florilège du discours de guerre contre le mouvement citoyen : «menace la paix et la stabilité publique, s’est toujours illustré par la voie de la violence, milice privée qui mène des actions ciblées contre les forces de l’ordre, met en péril l’unité nationale, etc.». Fort logiquement, le FNDC rejette en bloc ces accusations et opte de faire dans la résistance. Résultats : les manifestations prévues et qui avaient été mises entre parenthèses pour faciliter les négociations, sont relancées par le FNDC. A partir de ce mercredi donc, à moins qu’un modus vivendi soit trouvé pour faire tomber la fièvre socio-politique, la rue reprendra du service pour dire son refus de la gouvernance de terreur qu’imposent les putschistes au peuple guinéen. Faut-il craindre que le pays de Sékou Touré renoue avec les manifestations et chasses à l’homme qui se terminent dans le sang, endeuillant des populations à qui les gouvernants refusent le droit de s’exprimer, oubliant qu’à trop tirer sur la corde, elle finit toujours par se casser. En tout cas, la balle de l’apaisement dans le camp de la junte militaire qui ne doit pas oublier qu’elle est entrée sur la scène politique par effraction et a pour mission, dans les délais les plus raisonnables, de remettre le pouvoir aux civils par l’organisation d’élections ouvertes. Des allers et retours fréquentes en perspectives pour le Bissau-Guinéen, Oumaro Sissoco Emballo, nouveau président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et le médiateur de l’organisation sous-régionale, l’ex-président béninois, Yayi Boni .
MOURYA, LA VOIX DU NIGER